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ROMANCES SANS PAROLES


Cette célèbre oeuvre de 1845 composée par Felix Mendelssohn vient à mon esprit tandis que je m'interroge sur la place du verbe et celle du chant de l'âme.


Paul Verlaine écrira, lui, quelques années plus tard, en 1874, son recueil de Romances sans Paroles. Paradoxalement avec, pour seules notes, ses mots à lui...


Faut-il être musicien pour trouver certains sons plus parlant que des mots, quand on finit par les prononcer machinalement ! Et faut-il avoir célébré le silence pour mesurer ce qu'est, véritablement, une parole...


À l'ère où nous n'avons jamais autant véhiculé ce que l'on nomme "information", nous nous sentons, étonnamment en manque... en manque de contenu, de contenant, de sens ou de vérité. Les plus mystiques diront, simplement d"'amour". Non pas le sentiment créé de toute pièce par des récits ajoutés à l'histoire dans l'histoire. Mais au contraire à la substance même dont parlait Christiane Singer, cette substance qui, dépouillée de tout mensonge, se dévoile telle qu'on la nomme : "vie".


N'est-ce pas l'apanage de notre temps d'écouter ou de dire des mots qui ont fini par perdre leur sens tant l'on a osé les utiliser sans s'accorder ? Sans justesse ni diapason. Au fur et à mesure, les mots flétrissent, comme les notes d'un mauvais musicien, jouant en regardant sa montre, en attendant que "ça passe"... Il n'est pas besoin de chercher loin dans le contexte politique pour découvrir ces bouches qui bougent mais qui ne disent rien, ces sons qui sortent mais qui pourraient contenir n'importe quel mot. Alors, les oreilles ne savent plus. Et le coeur se sent seul. Terriblement inutile...


Bien sûr cet archétype politique, c'est celui qui est en chacun de nous, lorsqu'à chaque instant l'on se risque un échange de paroles automatiques, lorsqu'on glisse dans l'automate d'un corps absent de vie. Cela arrive plus fréquemment qu'on ne le croit. Il n'y a rien de grave d'ailleurs à cela. Les automates font partie de nos scènes de théâtre, aussi. Mais a-t-on conscience de ces parts, en nous ? Savons-nous discerner, joyeusement, lorsque nous n'y sommes plus vraiment ? Lorsque nous parlons pour ne rien dire ? Comme ces musiques d'ascsnceur ou certains encens qui ne sont pas là pour révéler mais presque pour cacher.


Pour cacher quoi ?


Victor Hugo disait que "la musique exprime ce qui ne peut pas s'exprimer avec des mots et sur quoi il est impossible de se taire."


La passionnée d'hypnose que je suis s'intéresse nécessairement à l'art des mots, celui si éminemment déployé par le grand Milton Erickson, hypnotiseur du 20ème siècle. Et je me rappelle ces cours de piano, au conservatoire de Paris, où le professeur répétait sans relâche ce que je répète à mon tour aux jeunes pianistes que j'accompagne : "parle ! Parle plus encore ! Prononce chaque note comme chaque mot... Articule, jusqu'à ce que ce soit parfaitement clair. Limpide !"


Les tests neuro-scientifiques et neuro-comportementaux nous ont déjà démontrés que l'on est d'abord attentif à l'intention, au geste, à l'intonation d'un discours avant de réagir réellement à son contenu. Si tout mon corps montre la sortie à quelqu'un et utilise une voix dure et tranchante pour lui dire "bienvenu !", il se peut que cette personne ressente un sentiment contradictoire. À l'inverse, nous savons maintenant, grâce à l'avancée de l'hypnose dans les hôpitaux, qu'un médecin peut être un scalpel mais tout à fait rassurant pour celle ou celui qui, en face, est déjà plongé dans un état propice et rassurant.


D'une certaine manière, tout cela est mécanique. D'une autre manière, cela n'a rien de mécanique. À chaque instant se joue la possibilité d'une inspiration. En avons-nous conscience ? Autant qu'il y a d'informations circulant dans le monde, il y a d'inspirations à travers chaque souffle, chaque brise de vent, chaque feuillage balayé.


Comment peut-on encore dire "il n'y a rien !" alors que tout est là ?


En ôtant les paroles pour mieux y laisser la romance, Mendelssohn célèbre en chaque être la possibilité d'y entendre sa vérité. Et plus encore... comme j'aime à le dire : "la musique est un hommage au silence." Voilà tout. Dire un mot, c'est faire exister tous les autres par contraste. Faire résonner une musique, c'est entourer ce que l'on croit immobile d'une vibration nouvelle, en relief.


"Le vase est au vide ce que le silence est à la musique" écrivit Paul Valéry. Et il se pourrait bien que nous soyons, nous-mêmes, par notre présence physique, exactement le seul endroit où ne sommes pas réellement, tandis que jous serions véritablement partout...


Subliminale... c'est ainsi que la vie, à mesure que je chemine, m'apparaît. En chimie, on appelle "sublimation" le processus par lequel une matière passe de l'état solide à l'état gazeux. Or plus le processus semble s'alléger, plus cela il m'apparaît "sublime" ! C'est précisément cette exclamation qui sort de soi lorsque, au contact d'un art si beau, l'on se sent subitement allégés, incroyablement fin et volubiles.


Je vous laisse sur ces mots et ces silences...


En vous chuchotant toute l'inspiration de votre mois d'octobre !


Hélène Tysman




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