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Hélène Tysman

LE DIAPASON DU COEUR


AFFINAR


Les latins ont ce terme que j'aime tant pour exprimer l'accord d'un instrument : "affinar".


Car accorder, ce n'est pas seulement manipuler des chevilles au bout des cordes d'un violon pour les tendre d'avantage ou les détendre. C'est bien plus que cela.


Il faut toute la finesse de l'écoute et la sensibilité d'un toucher pour réellement accorder un instrument.


Comment ne serait-ce pas de même pour nous ? Et dans ce cas, comment s'accorde-t-on soi-même et de soi à l'Autre ? Comment affine-t-on sa présence, c'est-à-dire sa conscience au monde ?


Voilà autant de questions qui m'émeuvent chaque fois. Car les poser, c'est déjà un peu y répondre. Dès l'instant où je me questionne sur l'Être, me voilà dans l'Être.


Lorsqu'un instrument se désaccorde - et cela peut arriver chaque jour, même (et surtout) auprès de virtuoses qui emploient leur instrument régulièrement - cela n'est pas toujours si perceptible. Car souvent ce sont toutes les cordes de l'instrument qui, ensemble, se sont légèrement détendues par exemple. D'autres fois en revanche, ce sera juste une corde qui se sera totalement désaccordée par rapport aux autres, comme lorsqu'une partie de soi est déjà passée à autre chose, tandis que le reste de l'être reste un peu ailleurs...


Lorsqu'on accorde un violon, un piano ou une flûte, il y a ce passage nécessaire par le désaccord. Avez-vous déjà entendu ces techniciens de piano tournant les chevilles du piano tantôt trop d'un côté ou trop de l'autre ? ...jusqu'à trouver son juste milieu.


Et combien est-il nécessaire de s'autoriser à tester ces vas-et-vient pour trouver, non pas l'angle au centimètre près d'un élément de l'instrument mais pour trouver cette vibration qui nous fait dire "oui" lorsqu'elle agit. Il faut alors toute la liberté en même temps que la finesse d'écoute pour trouver sa justesse. Au fond, il n'est question que d'ouvrir son coeur...


Les violonistes le savent, eux qui manoeuvrent les chevilles au bout de leurs cordes avec fluidité jusqu'à l'instant où ils trouvent l'équilibre parfait.


Au bout d'un certain temps, on ne peut plus expliquer comment se trouve cette justesse, mais l'oreille le sait. Et le coeur le dit. Quant au corps, il s'amuse dans l'espace...


S'ACCORDER PAR LE COEUR


Lorsque nos vies sont bouleversées, d'un côté ou de l'autre, une partie de nous prend soudainement une vibration nouvelle. Les autres ne se sont pas encore accordées à ce diapason.


La justesse n'est pas un objet figé. À chaque instant, la vie se renouvelle.


Ce n'est donc pas tant d'avoir un instrument accordé qui est si précieux, mais d'avoir la capacité, c'est-à-dire l'élan, en tant qu'instrumentiste, de savoir accorder et ré-accorder autant que nécessaire les cordes qui vibrent.


Affiner, c'est aussi s'affiner. Réaliser la subtilité de l'être. Au plus proche de la corde, il y a tout un univers. Invisible. De véritables vagues que provoque cette vibration perceptible à l'oreille. En vérité, tout le reste est aussi vibration. Mais l'entend-ton ? L'écoute-t-on ?


DÉCEMBRE


En cette période de décembre que je trouve très propice à l'ébullition de l'esprit, mon coeur et mon corps se désaccordent et se ré-accordent. Car, pour que la vibration opère, il faut aussi que la table d'harmonie, le bois, et tous les éléments qui forment cet instrument, soient agencés de manière équilibrée. Ainsi, si ma tête est riche d'idées mais que mon coeur se ferme... que valent ces idées ?


Longtemps j'ai vécu ainsi, excitée par toute brillance d'esprit, m'ennuyant vite si la tête n'était pas réquisitionnée et finalement passant à côté de toute une vie. Un jour, j'ai rencontré ma famille de coeur. Peu à peu, c'était comme réveiller mon diapason. Jusque-là seul mon esprit partait au loin dans le pays de la musique... Mais dans celui des humains, mon coeur était absent. Peut-être avait-il, comme tant de nous, été blessé ? Déçu ? Je vivais, dans ma tête ! En ouvrant, en ré-ouvrant ce coeur aux arc-en-ciel du matin et au sourire ou aux tristesses des passants, c'est mon corps tout entier qui s'est détendu.


Soudain, la conscience a jailli. Ce furent des expériences tantriques qui ré-harmonisèrent mon être tout entier, de la tête aux pieds. Que vaut la tête sans le chant du coeur ? Sans la vibration de l'âme ?


Parfois ce n'est pas la subtilité qui nous manque mais juste la conscience. Voir !


VIBRER


Notre corps est fait d'une colonne vertébrale digne de ces piliers qui permettent à chaque instrument de résonner le plus largement possible. Il y a une richesse et une finesse incommensurable. Et lorsque nous nous prenons à croire qu'il nous manque quelque chose, c'est le plus souvent qu'il nous manque juste de voir !


Lorsque nous croyons notre coeur vide, c'est que nous n'écoutons pas réellement sa mélodie. Sa musique !


Lorsque l'on s'attend à une petite musique, c'est toute une symphonie grandiose qui sonne. Bien au-delà de toutes nos attentes. Est-ce trop ? Nous ne l'avions pas imaginé, alors parfois, nous oublions de nous affiner, de nous accorder à nous-même pour entendre l'immensité de ce que nous sommes.


Il suffit d'une écoute. Demandez-vous quelle est la vibration de votre âme... quel est le chant de votre coeur ? Il n'y en a nul autre pareil. Et c'est pour cela que vous êtes ici !


La période de Noël a ceci de magique qu'elle nous rappelle de prendre soin de notre coeur, de réchauffer notre corps. Alors, la tête s'accordera, comme ce triton corps-coeur-esprit qui à travers nous crée cette harmonie subtile d'un monde infini.


Souvent en coaching, je rappelle ce mot tout simple mais si puissant : l'autorisation. Réaliser que l'on peut accorder, ré-accorder son être, c'est réaliser qu'on a le choix et qu'on est libre ! Alors la symphonie de la joie peut retentir...


Je vous souhaite, de tout mon coeur, de magnifiques fêtes de fin d'année, c'est-à-dire de célébrer le diapason qui est le vôtre, la vibration qui vous anime, réellement.


Au plus profond de vous.


Musicalement !


Hélène Tysman







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